Patrice Ahmed Abdallah est actuellement confiné chez lui en région parisienne avec son épouse.
Ils sont tous les deux Comoriens mais vivent en France, en région parisienne. Depuis bientôt trois semaines, comme tous les Français, ils sont confinés chez eux, en raison de la pandémie de Covid-19.
Hassani Soulaimana est technicien en bâtiment. Il travaille à la direction des bâtiments et des énergies de la mairie de Fontenay-sous-Bois. Ce père de quatre enfants, installé depuis 20 ans en France, mais seulement depuis un an en région parisienne, est confiné depuis bientôt trois semaines dans un petit appartement qu’il partage avec un ami.
« La vie en confinement est très difficile. Je vous laisse imaginer la vie que nous avons dans ce deux-pièces sans balcon ni terrasse. Je suis en télétravail depuis le 16 mars. Le travail est devenu la seule distraction et le seul passe-temps. Mais je ne vais pas me plaindre, j’ai la chance de pouvoir continuer à travailler depuis mon domicile. Je n’imagine pas les personnes qui ont été mises au chômage technique.
Dieu merci, notre cohabitation se passe très bien, même si je vois combien mon colocataire s’ennuie et combien il déprime. Mes enfants, qui sont loin de moi, me manquent.
Il m’arrive de sortir une fois par semaine pour faire les courses. Et en fin de journée, je descends au pied de l’immeuble pour me dégourdir les jambes, faire un peu de marche et prendre l’air. C’est encore autorisé, mais une heure par jour, pas plus.
“On devient paranoïaques”
De toute façon, on n’a pas vraiment envie de sortir car on a la peur au ventre. Dehors, on est obligés d’éviter les gens car on se dit que tout le monde est porteur du virus. C’est une psychose inimaginable et indescriptible. A chaque fois qu’on sent une douleur, même si ça n’a rien à voir avec les symptômes, on se dit : est-ce que ce n’est pas le Covid-19 ?
Je n’aurais jamais imaginé qu’une telle pandémie puisse un jour arriver, une pandémie où la seule mesure préventive est de rester à au moins un mètre de distance les uns des autres.
Je suis très inquiet pour la population qui est au pays quand je vois le comportement de ceux qui sont ici. Le non-respect du confinement va laisser des traces au sein de la population. Je suis surtout inquiet en raison de la quasi-inexistence de moyens sanitaires aux Comores. Quand on voit les hôpitaux saturés en France, la détresse du personnel soignant, le manque de réanimateurs, de maques, de gants… Je n’ose pas imaginer ce qu’une pandémie ferait à notre pays.
Les seules prières ne suffiront pas. Nous devons tous redoubler de vigilance. On peut être porteur du virus et ne présenter aucun symptôme. Donc la seule précaution et prévention, c’est la distanciation sociale. »
Patrice Ahmed Abdallah vit depuis cinq ans en région parisienne. La cinquantaine passée, ce père de deux grandes filles, de 24 et 22 ans, et d’un garçon de 17 ans, dirige les Editions Kalamu des îles.
“Depuis le début des mesures gouvernementales de confinement, je reste chez moi. Je circule entre mon bureau, mon salon et ma chambre à coucher. Je vis avec mon épouse dans un appartement de trois pièces. J’ai un jardin indépendant de l’appartement.
Je n’ai pas encore mis le nez dehors. Sauf deux ou trois fois pour aller à ma boite aux lettres. Nous avons suffisamment de provisions. Quant à l’activité physique, je n’en fais pas trop (rires).
Le confinement se passe très bien. Entre mes occupations intellectuelles et mes obligations professionnelles liées au télétravail, je ne me plains pas. En réalité, ça ne change pas beaucoup de choses pour moi. Je suis habitué à partager mon temps entre mes activités éditoriales et mes activités professionnelles depuis longtemps. J’ai établi un planning autour d’un programme bien défini. Entre mes lectures de manuscrits, ma lecture personnelle et l’écriture de nouvelles œuvres, mes journées sont bien remplies. En revanche, ce confinement a forcément un impact sur les activités de la maison d’édition que je dirige, Kalamu des îles.
“On a peur pour les autres”
La cohabitation nous permet, mon épouse et moi, d’être davantage complices et de partager beaucoup plus de temps ensemble. Nous avons des discussions renouvelées autour de nos divers projets, que le manque de temps jusqu’alors nous privait…
Je n’ai pas peur car j’observe les gestes barrières et surtout le confinement. Mon épouse également. Mais loin des miens, de mes sœurs et frères qui sont en France avec moi, de mes enfants que je n’ai pas vus depuis le début de ce confinement, je ressens de l’inquiétude. Je pense à mon fils qui prépare son bac cette année dans ces conditions exceptionnelles… Et à ma famille restée aux Comores. Au peuple des Comores. A chaque instant, mes pensées vont à ceux et celles qui sont au pays. Mes prières également.
Je pense que le gouvernement fait de son mieux dans la mesure des moyens en sa possession pour protéger la population. De toute façon, l’heure n’est pas à la polémique mais à la solidarité. A la population d’observer les gestes barrières. C’est le seul moyen de limiter la contagion.”