La mère de Sakina a dû arrêter son travail sur les marchés pour s’occuper de sa fille violée à l’âge de 6 ans. Elle est complètement démunie face à l’ampleur du traumatisme. (Photo MaDemoiZell)
PAR HAYATTE ABDOU
Le nombre de viols est en recrudescence aux Comores. Les victimes mineures sont parfois très jeunes. Pourtant, les juges continuent de minimiser ces crimes en les traitant comme de simples délits. Et lorsque les agresseurs sont condamnés, ils sortent de prison après quelques mois seulement passés derrière les barreaux. Les associations d’aide aux victimes de violences sexuelles sont démunies. Les institutions ferment les yeux.
Assise en tailleur, à même le sol, Fawuza* enserre ses pieds avec ses mains et commence son récit. Plus de deux ans après les faits, la douleur est intacte. “C’est arrivé le 11 avril 2018, une date que je n’oublierai jamais. Je me reposais dans ma chambre car je venais d’accoucher quelques jours plus tôt de ma cinquième fille, mon sixième enfant. Deux femmes toquent à la porte avec un “hodi”. Je me lève, je m’avance vers elles, je les regarde, ma fille Sakina* entre les deux. Je ne la reconnais plus. Elle est couverte de poussière de la tête au pied, sale, avec des plaies au visage. Mon corps commence à trembler, mon cœur bat trop vite, je la tire vers moi. Elle est hagarde. Je remarque qu’elle ne porte rien d’autre que son hidjab ; son haut et ses collants ont disparu.
Je soulève son hijab et je vois qu’elle saigne, du sang coule le long de ses jambes. Elle a des plaies aux genoux et aux pieds. Je lui demande ce qui lui est arrivé. Elle ne répond pas. Je l’amène dans sa chambre, et lui pose de nouveau la question. En sanglots, elle me raconte : “ Il m’a dit qu’il allait me montrer l’endroit où on achète les poissons. Je l’ai suivi. C’était loin, très loin. J’étais fatiguée. Il m’a fait entrer dans une maison, m’a dit d’enlever mes vêtements. J’ai refusé, il m’a poussée, je suis tombée. J’ai essayé de le pousser mais je n’ai pas réussi. Il m’a fermé la bouche, j’ai eu très mal. Il m’a dit qu’il allait me tuer si je criais. Il m’a retournée. Je ne pouvais pas crier. J’ai eu très mal maman. J’ai pris mes vêtements pour essuyer le sang.”
Nous rencontrons Fawuza dans son village situé dans la région d’Itsandra. La quarantaine, elle élève ses enfants seule depuis que leur père est parti. Assise dans un conteneur près de sa maison, c’est là qu’elle travaille maintenant. Depuis que sa fille Sakina, 6 ans au moment des faits, a été violée, elle reste à la maison. “Je n’étais pas tranquille, j’étais bonne à rien, je ne supportais pas de la savoir seule à la maison. Même si sa grand-mère et ses sœurs sont là, je n’en pouvais plus, j’avais peur tout le temps. Il suffisait d’un klaxon pour que je sursaute. C’était insoutenable.” Avant, elle était vendeuse à Volovolo, le grand marché de Moroni. Elle a transformé le conteneur en petite boutique : une machine à coudre sur la table, des tissus à côté. De temps en temps, dit-elle, elle coud des robes pour des amies.
Elle nous invite à entrer dans la maison. Il n’y a pas de porte d’entrée, juste un contreplaqué. A l’intérieur, pas de chaises non plus. Elle nous fait asseoir sur un matelas jeté par terre. Plus de deux ans après les faits, les questions tournent toujours en boucle dans sa tête. Domine en elle l’incompréhension totale.
Le violeur de Sakina, âgé de 20 ans, a été interpellé et a reconnu les faits. Il a été condamné par le tribunal correctionnel de Moroni, le 25 juin 2020, à une peine de 10 ans de prison ferme pour agression sexuelle. Le 7 juillet, il a quitté la maison d’arrêt sans aucune explication.
“ Je n’arrive pas à comprendre, comment l’homme qui a fait ça à ma fille ne soit plus en prison, explique la mère de l’enfant. Comment ont-ils pu le laisser sortir ? Il n’a même pas purgé un mois de sa peine. Où est la justice dans ce pays ? Elle avait 6 ans, c’est un bébé ”. Elle ajoute : “ Ma fille a subi deux interventions réparatrices du vagin. Elle a passé six jours à l’hôpital. Elle ne pouvait ni s’asseoir, ni s’allonger.”
L’histoire de Sakina n’est pas isolée. En avril dernier, nous rapportions sur notre site d’information National Magazine Comores, l’histoire de la jeune Anziza. Entre octobre 2019 et janvier 2020, Anziza, 12 ans, a été violée à plusieurs reprises par six garçons, dont trois habitants de Mtsangani, son quartier de Moroni. Condamnés pour agressions sexuelles à deux ans de prison ferme, ils ont été relâchés après avoir passé trois mois seulement derrière les barreaux.
Nasma*, 8 ans, a été sodomisée par un homme de 40 ans, qui l’avait attirée avec des bonbons. Le procès a eu lieu en juin 2020. Son agresseur a écopé d’une peine de 7 ans de prison ferme pour agression sexuelle..
Depuis quelques mois, face à ces agressions gravissimes, des hommes et femmes éduqués dans le respect de la culture traditionnelle et l’omerta rompent le silence. Qu’ils ou elles soient de la diaspora ou vivant dans les territoires insulaires, ces voix s’élèvent pour dénoncer les violences sexuelles et la quasi-impunité de leurs auteurs.
La parole des victimes se libère et les témoignages sur les réseaux sociaux se multiplient. Sur Facebook, des jeunes femmes confient leurs souffrances jusqu’à là tues, leur calvaire. “J’ai été violée à plusieurs reprises par mon beau-père”, lit-on. “Mon foundi, tous les après-midis, me laissait seule avec lui au shiyoni pour me violer.”
62 affaires jugées en deux semaines
Face à ces révélations et la montée de la colère populaire, le ministère public a voulu marquer le coup. Des audiences spéciales avec le même chef d’inculpation : agressions sexuelles ont été organisées au mois d’août au tribunal correctionnel de Moroni. “Nous avons organisé ces audiences car nous nous sommes rendus compte que les agressions sexuelles revenaient couramment sur les plaintes déposées. Au moins deux procédures d’agression par jour”, explique le procureur de la République Mohamed Abdou. Pas moins de 62 affaires ont été jugées – certains observateurs diront expédiées – sur une période de deux semaines. Parmi les condamnations les plus lourdes, cinq agresseurs ont écopé de dix ans de prison ferme, la peine maximale prévue par l’article 319 du code pénal qui punit les agressions sexuelles au titre des délits.
C’est aussi sur le fondement de cet article qu’ont été jugés les violeurs de Sakina, Anziza et Nasma. Un simple délit. Et non pas un crime, comme le prescrit pourtant la loi Mourad en matière de viols. En effet, à plusieurs reprises, durant ces procès, des avocats ont réclamé l’application de l’article 318 de la loi Mourad en lieu et place de l’article 319 du code pénal qu’elle a abrogé et remplacé. Sans succès. Comme si le viol n’existait pas aux yeux de la justice comorienne.
Contrairement à l’ancien article 319 du code pénal, la loi Mourad, du prénom du ministre de la justice de l’époque Mourad Said Ibrahim, promulguée en 2007, distingue les agressions sexuelles des viols. Dans son article 318, elle criminalise le viol et prévoit des peines très lourdes allant de 15 ans de réclusion jusqu’à la mort en cas de meurtre de la victime. En revanche, elle diminue le niveau des peines en matière d’agressions sexuelles. Dans le nouvel article 319, elle prévoit que “les agressions sexuelles autres que le viol” sont punies, au titre des délits, de cinq à dix ans d’emprisonnement en cas de circonstances aggravantes (contre dix à quinze ans dans son ancienne version).
Elle définit le viol comme “tout acte de pénétration sexuelle de quelque nature que ce soit commis sur la personne d’autrui quelque soit par violence, contrainte, menace ou surprise” et a été complétée par la loi Fatah. En tant que crime, la cour d’assises est compétente.
Pourtant, l’article 318 de la loi Mourad n’a jamais été appliqué. Alors que les violences sexuelles répondant à la définition juridique du viol existent bel et bien, jamais une cour d’assises n’a eu à juger ce type d’affaires. Systématiquement, les viols font l’objet d’une correctionnalisation et relèvent de l’article 319 du code pénal. Qualifiés de délits, ils sont du ressort du tribunal correctionnel. Non seulement, les agresseurs ne sont pas jugés sur la nature véritable de leurs actes, mais ils écopent de peines inférieures à celles que prévoyait l’ancien article 319 du code pénal. Les victimes se sentent flouées.
Le viol serait-il un crime fantôme aux Comores ? Le procureur général Soilihi Djae se défend : “S’il y a des viols, cela ne nous est pas parvenu.” Le subtitut du procureur de la République, Abdou Ismael affirme lui aussi ne pas être au courant des affaires de viol. Comment est-ce possible lorsque des certificats médicaux font état d’une pénétration, comme dans celui de Sakina où le médecin note “ une pénétration vaginale et anale et une émission de sang” ? ; quand dans l’ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, il est écrit noir sur blanc que le prévenu “a introduit son pénis dans le sexe de la victime mineur de six ans” ? ; comment expliquer une telle amnésie quand même les accusés reconnaissent le viol et que la définition juridique ne fait aucun doute ?
Le substitut du procureur de la République réitère son affirmation : “ Non, je ne suis pas au courant de ces affaires.” “Faux”, atteste l’avocat de Sakina et Anziza, Abdillah Mmadi Said. “C’est lui qui était là et qui a traité ces deux affaires. Comment peut-il ne pas être au courant ? ”
Si le parquet de Moroni retient régulièrement le chef d’inculpation d’agressions sexuelles, le viol passe à la trappe.
“Pour que la cour d’assises siège il faut qu’il y ait mort d’homme”
“Impossible que vous trouviez dans les archives du parquet des procès pour viol en tant que crime, confirme un ancien juge d’instruction. Je vous le dis, Madame, ma main à couper !” Pour lui, la cour d’assises ne peut siéger à tout bout de champ. “La correctionnelle c’est facile, ça permet de régler les affaires tous les jours au lieu d’attendre une cour d’assises.”
Même refrain chez Mohamed Ahmed alias Sako, ancien procureur de la République, ancien procureur général, en poste après la promulgation de la loi Mourad. Ce magistrat qui a “passé toute sa vie au parquet” confirme : “Non, aucun procès pour viol n’a jamais été organisé ici. La cour d’assises n’a jamais siégé pour ça. Pour qu’elle siège, il faut qu’il y ait mort d’homme.”
Il explique que la tenue d’une cour d’assises coûte chère. “Cela demande du temps, de l’énergie et des moyens financiers. On ne peut pas la convoquer à chaque fois. Peu importe la nature du crime, c’est la mort ou pas de cour d’assises”, insiste-t-il.
De son côté, le procureur général, Soilihi Djaé, s’en remet au pouvoir discrétionnaire du procureur de la République : “Il a le droit d’apprécier librement tous les actes qui lui sont remis. C’est à lui de décider si c’est un crime ou un délit.”
Justement, mieux vaut ne pas parler de viol au procureur de la République. Alors que nous lui rappelons les faits de l’affaire de Sakina afin de comprendre les raisons qui l’ont poussé à correctionnaliser le dossier, Mohamed Abdou se met en colère. “Nous n’allons pas entrer dans ce débat de qualification. Ce n’est pas pour ça que vous êtes venus. Si vous voulez poser des questions, je vous demanderais de partir.” Et d’ajouter : “ Je ne suis pas là pour faire des commentaires de la loi, bonne ou mauvaise, on l’applique.”
Sorti de ses gonds, il hausse le ton : “ Vous êtes venus pour que je m’explique. Vous voulez savoir pourquoi je n’ai pas qualifié cet acte de viol ? Vous voulez me pousser à répondre à cette question ! Non, je ne veux pas répondre ! Je ne connais pas ce dossier, je ne l’ai pas entre mes mains. Si c’est ça qui vous a amenée ici, je vous demande de partir avant que je m’énerve !” Sans nous avoir donné le temps de répondre, Mohamed Abdou se lève et nous ouvre la porte.
Le ministre de la Justice Mohamed Housseine assure que “ce n’est pas la loi Mourad qui a un problème. D’ailleurs, à l’occasion de la révision du Code pénal qui est en cours, nous allons criminaliser les agressions sexuelles. Elles ne seront plus un délit”. Pour lui, point d’excuses pour les auteurs de violences sexuelles. Le parquet de Moroni doit appliquer la loi. “Aucune liberté conditionnelle ne sera accordée aux personnes accusées de violences sexuelles. Et pour arriver à des résultats, une cour permanente siégera et aura comme responsabilité d’organiser des assises.” Le ministre promet que ces mesures entreront en vigueur dès que la révision du Code pénal sera adoptée à la prochaine session de l’Assemblée nationale.
Mystère autour des libérations
Perdues dans les méandres de la justice comorienne, les victimes de viols subissent une double peine. Non seulement leurs agresseurs ne sont pas condamnés à la hauteur de la gravité des faits commis, mais, bien souvent, ils n’effectuent pas la moitié de leur peine. Soit parce qu’ils bénéficient d’une libération provisoire (avant jugement) ou conditionnelle (après la condamnation par le tribunal) ; soit parce qu’ils quittent la prison sans laisser de traces.
Comme ce jour du 7 juillet 2020, où le violeur de Sakina a quitté la maison d’arrêt mystérieusement, juste avant que les juges ne rendent leur verdict au terme duquel il sera condamné à dix ans de prison ferme. “ Nous devions normalement retourner au parquet pour le délibéré, explique la mère de Sakina. Mais à ma grande surprise, il était absent. Lorsque nous sommes sortis, j’ai demandé à l’homme en uniforme qui ramène toujours les prisonniers si le violeur de ma fille était à la maison d’arrêt. Je lui ai montré la photo. Il m’a dit qu’il était parti le 7 juillet. Sans explication, rien.”
L’avocat de la jeune victime, Abdillah Madi Said, n’a pas obtenu plus de détails. “Je ne suis pas au courant de l’existence d’un ordre d’élargissement. Je n’ai aucune information concernant les motifs de sa libération.” Interrogé, le procureur général tombe des nues. Il appelle le gardien de prison qui lui confirme que l’homme n’est plus en prison “depuis longtemps”, sans autre précision.
La prison de Moroni, gérée par une société privée, est devenue une passoire. Régulièrement, des prisonniers se sauvent sans laisser de traces. Le procureur général, Soilihi Djaé, affirme ne pas comprendre ce qui se passe. “J’ai même été dans l’obligation récemment de mettre aux arrêts certains agents en uniforme et le gardien de la prison pour les évasions inexpliquées de détenus”.
Concernant les libérations conditionnelles, Soilihi Djaé explique que “c’est le ministre de la Justice qui décide sur avis de l’administration pénitentiaire”. Toutefois, il estime : “Aucun détenu ne devrait se voir accorder une liberté conditionnelle s’il n’a pas purgé la moitié de sa peine.” La liberté provisoire relève du juge d’instruction ou de la chambre d’accusation. “ Le juge ou la chambre peuvent accorder une liberté si cette dernière ne cause pas de troubles à l’ordre public, si elle n’entraîne pas une concertation frauduleuse et si la personne accusée ne quitte pas le territoire”, détaille le procureur général.
Récemment, en juillet 2020, une décision de la chambre d’accusation qui accordait la liberté provisoire à un enseignant coranique accusé d’avoir violé son élève âgée de 12 ans a provoqué des remous dans l’opinion publique et dans les hautes sphères de la justice. L’avocat Me Fahmi Said Ibrahim, qui avait critiqué la décision lors d’un passage au journal télévisé, a été menacé de radiation.
Pendant ce temps, les victimes de viol et leur entourage essaient tant bien que mal de surmonter le traumatisme qui bien, souvent, les condamne à la souffrance à perpétuité. Sans aucun suivi, ni médical ni psychologique, Sakina est devenue colérique. “Ces derniers temps, elle est étourdie, témoigne sa mère. Elle n’entend rien, elle oublie tout. Qu’on ne lui parle pas d’aller au shiyoni ni à l’école. Elle jette ses affaires, elle refuse catégoriquement. Elle a des terreurs nocturnes, elle sursaute et frappe ses sœurs”.
Fawuza est désemparée. Elle reste là à guetter sa fille pour qu’elle ne se fasse pas de mal ou à ses sœurs. Elle culpabilise aussi de ne pas avoir les moyens de lui offrir les soins dont Sakina aurait besoin.
La mère d’Anziza vit le même calvaire. “Elle est hantée tous les soirs. Elle ne dort pas. Le moindre bruit l’a fait sursauter.”
Des demandes restées lettre morte
Les associations de lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants ont des moyens limités. Elles facilitent les démarches à suivre pour un éventuel dépôt de plainte. Un médecin et un avocat sont mis à la disposition des victimes. Mais en dehors des démarches administratives, ces associations ne proposent aucune autre forme de soutien et l’efficacité de leur action est somme toute relative.
Ces associations sont pourtant légion sur l’archipel des Comores. De nouvelles sont régulièrement créées. Trois d’entre elles s’érigent en porte-drapeaux de la cause : Hifadhui, dirigée par Rahamatou Goulam, Moina Tsi Wa Mdzima, pilotée par Said Abdallah Najda et les Petits z’anges, gérée par Hissani M’sahazi Rassoul. Toutes organisent la lutte à coup d’actions de sensibilisation.
“Je reconnais qu’il y a une grande injustice. Certes, les victimes ont besoin de bien plus que de sensibilisation, admet la présidente de l’ONG Hifadhui. Nous devons trouver le moyen de changer cela et de mieux les protéger.” Même refrain chez Said Abdallah Nadja : “Pour l’instant, nous ne faisons que de la sensibilisation. Nous n’avons pas encore les moyens d’agir autrement.” Quant aux Petits Z’anges, le vice-président Ali Abdallah assume la portée limitée de leur action en déclarant que l’association n’a jamais prétendu faire autre chose que de la sensibilisation.
En septembre dernier, douze associations comoriennes ont déposé un plaidoyer sur le bureau de Beit Salam “en faveur de la protection des femmes et des enfants”. Elles y rappelaient les chiffres sans cesse en augmentation. “Ces cinq dernières années, les cas de viols et d’agressions sexuelles ont connu une recrudescence sans précédent sur l’ensemble du territoire national, atteignant aujourd’hui un stade qui dépasse l’entendement.” Avant de détailler : “Entre le 1er janvier 2019 et le 30 juin 2020, sur 665 enfants reçus par les services d’écoute et de protection de l’enfant et de la femme victimes de violences, plus de 57 %, soit 381 enfants ont été victimes d’agressions sexuelles dont au moins deux décès.”
Dans ce document, les associations disent assister “à une forte croissance des dénonciations” et alertent sur la “situation très alarmante tant sur l’impunité des malfaiteurs que sur l’insuffisance de l’accompagnement des victimes et des organisations d’aide aux victimes.”
Elles rappellent aussi les engagements faits par le président Azali Assoumani, dans son allocution à Anjouan le 6 juillet dernier, à l’occasion de l’anniversaire de l’indépendance des Comores. Ce jour-là, le président avait ainsi déclaré : “Je m’engage ici, en ce jour symbolique, à prendre des initiatives et des mesures, dans les jours et les semaines qui viennent contre la recrudescence inquiétante des actes de violence et des agressions, en particulier contre les enfants et les femmes, dans nos îles.”
Elles réclament 18 mesures dont l’application “stricte et sans équivoque” par les juridictions de la loi Mourad qui a criminalisé le viol ; la mise en place de tribunaux spéciaux pour juger les affaires de viols et de violence faites aux femmes et aux enfants ; la mise en place d’une politique pénale spécifique aux cas de viols réglementant le traitement des libertés provisoires ; l’application de sanctions sévères et exemplaires à l’encontre des magistrats auteurs d’actes de non-respect strict de la loi.
En attendant, aujourd’hui encore, Fawuza restera à la maison pour veiller sur sa petite fille, en priant qu’un jour, à défaut de celle des hommes, “la justice divine fasse son travail”.
*Noms d’emprunt